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La piraterie du 15ème au 18ème siècle

Activisme politique ou Le rêve d’une société alternative

P.2 Suite

Idéaux révolutionnaires de l’utopie radicale démocrate

« Gardiens des droits et des libertés des peuples Â»

 

Fondements sociaux

 

Le pouvoir monarchique qui dominait l’Europe et le monde à la fin du 17ème

allait être soumis à controverses par des idéaux révolutionnaires pour l’époque.

En effet, les classes dirigeantes (Anglaises notamment) s’étaient attachées à instaurer un système capitaliste régulé,

grâce au commerce de métaux précieux, d’épices, d’étoffes, de divers produits issus des prises mais aussi d’esclaves.

La majorité des pirates de l’Atlantique étaient d’anciens marins des navires marchands

qui s’enrôlaient comme volontaires après la prise de leur vaisseau. 

 

La piraterie tolérée, contrôlée et quelquefois fomentée par les pouvoirs monarchiques avait longtemps

servi ces pouvoirs, les besoins de l’état et la communauté marchande.

Mais son contrôle allait progressivement passer du haut de la société au bas, des hauts fonctionnaires d’état,

et puissants marchands, aux petits marchands et gueux des mers. Dès 1690, marins ordinaires et pirates commencèrent

à esquisser puis organiser un monde en marge et contre les dictas de l’autorité mercantile et impériale.

 

L’organisation sociale des pirates issue de sources ancestrales allait de l’utopie paysanne traditionnelle de

la Â« terre de cocagne Â» (abolition du travail, redistribution des propriétés, nivellement des classes sociales, couverture

de santé et abondance de nourriture) jusqu’aux coutumes maritimes de l’antiquité et du moyen âge imposant aux marins

un partage en parts égales des richesses et des biens ainsi qu’à la mise en place d’un conseil consultatif collectif

et démocratique concernant les « affaires et questions de la vie à bord Â».

 

La piraterie qui profitait aux classes supérieures du nord de l’Europe occidentale contre l’Espagne allait devoir faire face aux droits coutumiers élaborés par les hommes de mers renégats et pilleurs.

On ne peut passer à titre d’exemple, la société des boucaniers, société multiraciale comprenant

les « proscrits de toutes nations Â» qui comptait dans ces rangs tous les hommes et femmes ayant subi les infortunes

du sort et de condition désespérée.

 

Ainsi, anciens prisonniers, vagabonds, prostituées, esclaves et domestiques en fuite, hérétiques, exilés et autres

bannis constituaient une nouvelle société aux Caraïbes.

La culture des boucaniers prend sa source dans la vague des révoltes paysannes de France au début du 17ème siècle

contre le fisc royal et la prolifération des agents de la Couronne (1630).

Cette date marque le début de la flibuste aux Antilles.

Les protagonistes de ces soulèvements populaires avaient fait preuve d’une extraordinaire capacité

d’auto-organisation passant par la constitution de communes, élection de députés et promulgation d’ordonnances

au nom du « commun peuple Â».

A cela, il faut ajouter les idées de l’Angleterre révolutionnaire de 1660 prônées par les radicaux Anglais qui émigrèrent

aux Indes occidentales à cette période.

Les sources principales de ces organisations se trouvent dans l’expérience du travail, des salaires, des codes sociaux,

de l’autorité et de la vie en mer.

 

En 1701 après la guerre de Succession d’Espagne, les conditions de travail dans la marine marchande se détériore

au point que bon nombre de marins, notamment après 1718 qui marque l’amnistie générale accordée aux pirates

Anglais par Georges 1er, des milliers de marins rejoignent le jolly rogers, enivrés par la perspective de la libre butinerie (flibuste), de l’argent facile, de la nourriture, de la boisson mais aussi assoifés de démocratie, d’égalité, de justice

et de soutien aux infirmes avec pour devise « une vie courte, mais heureuse Â».

 

Pionniers des sociétés utopiques

 

A l’image de la république de Bou Regreg au Maroc qui semble avoir été l’âge d’or des barbaresques

(pirates et corsaires de barbarie, c'est-à-dire de la méditerranée Maghrébine), les pirates nommaient leur

« Cosa nostra Â», la république de Salé. Celle-ci n’étant pas qu’un repaire, mais bel et bien un concept utopique

définissant une structure de société démocratique avec ses propres codes, son langage, ses institutions et biens,

son économie, ses rapports humains, sa philosophie et la variété de ses peuples, constituant de fait une entité

sociale particulière et identifiable.

 

Donc vers la fin du 17ème et début du 18ème, de nombreuses utopies pirates allaient naître au-delà de la méditerranée,

ce fut le cas dans les Caraïbes avec St- Domingue et Haïti (Hispaniola), L’île de la Tortue,

New-Providence et Nassau aux Bahamas, maiségalement dans d’autres parties du monde telles la Baie des Divagateurs

et au nord de Madagascar avec Libertalia.

Concernant les Caraïbes, les boucaniers fondèrent leur société sur des bases se rapprochant

de celles de la république de Salé.

Retenons en quelques points comme : Elections des officiers, bannissement des châtiments corporel,

règlement des différents par un tribunal selon les règles du duel, harmonie entre les races et les classes,

solidarité, absence de tutelle gouvernementales …

 

Le mot d’ordre étant : « Le droits des peuples et leurs libertés civiles Â» comme principe de résistance au droit moral

de tuer et de voler (la guerre et l’impôt) appartenant aux états dits rationnels, non-laïques et capitalistes de l’époque

compte tenu que dans nos sociétés modernes et à présent rien n’a changé sinon la séparation de l’église et de l’état.

 

Source : Utopie pirates de Peter Lamborn Wilson / Ed. Dagorno

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